Mis à jour le 22/03/2024
/Le commerce international est au cœur des enjeux économiques de nos entreprises et de nos enjeux climatiques. La nécessité d’être au plus proche de nos clients et de respecter les contraintes de livraisons dans des délais de plus en plus contraints nous amène souvent à revoir nos schémas de livraison. Ainsi nos clients livrés ne sont plus nécessairement nos clients facturés.
Dans ce cadre, il est alors indispensable de revoir nos schémas de facturation et le traitement TVA des livraisons de biens dans un contexte de changement législatif européen en tenant compte également des enjeux de facturation électronique dont la mise en place approche tant au niveau français qu’au niveau européen.
C’est sur cette thématique que sont intervenues Anne-Sophie de BÉCHADE et Maëva LÉCUYER, avocates au sein du Département Droit fiscal de KPMG Avocats, lors d’un webinaire proposé aux entreprises bretonnes.
Elles ont pu aborder ces nouveaux enjeux pour une meilleure compréhension des sujets TVA et des points de vigilance ou de recommandations au sein des entreprises.
Que faut-il retenir de ce webinaire?
Retour de Cindy Le Guern – Conseillère International
” Cette réunion d’information a eu pour objectif de sécuriser le traitement de la TVA des opérations dans lesquelles plusieurs flux financiers peuvent participer à un même flux physique.
Les intervenantes se sont focalisées sur les flux de biens intracommunautaires.
Pour chaque opération, il est important de connaître le pays de départ et le pays d’arrivée.
Elles ont préconisé la méthodologie suivante pour bien qualifier le régime de TVA de ses opérations :
- Quelle est la nature de l’opération ? (Livraison de biens ou de prestations de services ?)
- Quelle est son lieu d’imposition ? Dans quel pays la TVA est-elle due ? (Regarder les règles applicables dans le pays)
- L’opération est-elle taxable ou exonérée ?
- Qui est redevable de la TVA due sur ce flux ? L’acheteur ? Le vendeur ?
- A quel moment doit-être versée la TVA ?
Dans un premier temps, elles ont évoqué la notion de territorialité des opérations portant sur les biens ainsi que quelques définitions : acquisition intracommunautaire, livraison intracommunautaire, introduction, expédition et transfert de stock…
Un rappel a été fait sur le renforcement des conditions d’exonération des livraisons intracommunautaires depuis le 1er janvier 2020 (réforme des Quick Fixes).
Avant l’entrée en application de cette réforme, l’exonération de TVA pour les livraisons intracommunautaires prévue aux articles 262 ter-I du Code Général des Impôts (CGI) et 138 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 était soumise à quatre conditions :
- La livraison devait être effectuée à titre onéreux
- Le vendeur devait être un assujetti en tant que tel
- L’acquéreur devait être un assujetti ou une personne morale non assujettie, qui ne bénéficiait pas d’un régime dérogatoire (PBRD) dans son État membre
- Le bien devait être expédié ou transporté hors de France et à destination d’un autre État membre de l’Union Européenne
Avec la mise en place des Quick Fixes en 2020, les preuves justifiant du transport entre la France et un autre pays de l’Union Européenne ont été renforcées : deux conditions supplémentaires sont maintenant nécessaires pour bénéficier de l’exonération de TVA sur une livraison intracommunautaire :
- L’acquéreur doit être identifié à la TVA dans un Etat membre autre que celui de départ ou de l’expédition des biens et doit avoir communiqué son numéro d’identification au fournisseur
- Le fournisseur doit avoir déposé l’état récapitulatif mentionné au I de l’article 289 B du CGI
Il est préconisé de vérifier régulièrement le numéro de TVA intracommunautaire de vos clients UE à partir de la base VIES et de récupérer un maximum de preuves de sortie du territoire de la marchandise pour pouvoir exonérée l’opération de TVA.
Dans un second temps, elles ont développé le principe d’une opération triangulaire : une entreprise A assujettie à la TVA dans un pays de l’UE, vend des biens à une entreprise B assujettie à la TVA dans un autre pays de l’UE, qui elle-même revend les biens à une entreprise C assujettie à la TVA établie dans un troisième Etat membre. Les biens sont directement livrés du pays de l’entreprise A vers le pays de l’entreprise C. L’entreprise, B n’est établie fiscalement dans aucun des deux autres pays. Nous sommes sur des ventes successives dites ventes en chaîne.
Cette opération peut bénéficier de la simplification prévue par l’article 141 de la directive européenne 2006/112 et permet à l’entreprise B d’être dispensée du paiement de la TVA et de l’obligation de s’identifier dans un autre Etat membre. Les entreprises A, B et C doivent être chacune identifiées à la TVA dans leur pays respectif et l’entreprise B ne doit pas être identifiée ni dans le pays de départ, ni dans le pays d’arrivée des biens.
Plusieurs cas pratiques ont été présentés pour comprendre le traitement fiscal de ces opérations dites « complexes ».
Pour avoir plus de détails sur les opérations triangulaires, vous pouvez consulter le Bulletin Officiel des Impôts ici.
Il a aussi été question de ventes en consignation pour clôturer cette session de sensibilisation. Les biens sont expédiés dans les locaux de votre client mais le transfert de propriété n’interviendra que lorsque celui-ci les revendra à un sous-acquéreur.
Avant 2020, lorsque vous effectuiez ce type d’opérations, vous étiez tenus de vous identifier à la TVA dans le pays de stockage. Des mesures de simplification permettaient dans certains pays d’éviter l’immatriculation à TVA dans le pays de stockage. Depuis le 1er juillet 2020, il n’est plus nécessaire pour les fournisseurs de s’identifier à TVA dans le pays de stockage si les marchandises y restent moins de 12 mois. Cela signifie que lorsque vous expédiez votre marchandise dans le stock de votre client, on considère qu’il y a transfert physique sans transfert de propriété : ce transfert n’est plus considéré comme une livraison intracommunautaire en France, ni comme une acquisition intracommunautaire dans le pays de stockage. Pour que cela soit possible, les obligations déclaratives lors du transfert de stock puis du transfert de propriété qui intervient au fur et à mesure que votre client prélève la marchandise dans le stock ont été expliquées. (Cf. BOFIP).
Enfin, de façon générale, lorsque vous réalisez des échanges intracommunautaires, il convient avant tout de prêter attention au flux physique de la marchandise et aux règles de TVA applicables dans les différents pays. ”